Trop d’experts rémunérés par les laboratoires

Article à paraître dans le magazine NEXUS

NOVEMBRE DECEMBRE 2009

par PRYSKA DUCOEURJOLY

Le comité technique des vaccinations (pour le Haut conseil de la santé publique) est chargé d’établir des avis sur les priorités sanitaires d’utilisation des vaccins pandémiques. C’est au CTV qu’on doit les recommandations sur la vaccination des personnels de santé, des femmes enceintes et des jeunes enfants. Or, sur vingt membres, seuls cinq n’ont pas travaillé, de près ou de loin, avec des laboratoires. Sur les quinze membres ayant exercé une activité de conseil, de travaux scientifiques, de rapport d’expertises ou de conseil scientifique, quatorze l’ont fait avec des laboratoires qui vont commercialiser le vaccin H1N1. Parmi ces scientifiques, celui qui détient le nombre record de collaborations privées n’est autre que le président du comité (avec des contributions pour Sanofi-Pasteur, Wyeth, GSK) ce qui lui a valu de nombreux voyages en 2008 (Autriche, Islande, Etats-Unis, sur invitation). Largement de quoi de douter de l’impartialité du CTV.

Le Canard Enchaîné a lui aussi épinglé les experts d’un autre organisme : le Comité de lutte contre la grippe. Ce dernier rassemble plusieurs experts du CTV mais également d’autres spécialistes dont plusieurs ayant des liens avec le fabricant du Tamiflu, en tant qu’expert ou membre du conseil scientifique de Roche. Par ailleurs, le Canard a rappellé que la représentante de la France à l’Agence européenne du médicament travaille elle aussi pour Roche depuis 2006, et conseille contre rémunération MSD, GSK, Wyeth et Baxter, tous fabricants de vaccins. Quant au directeur de l’Ecole des hautes études en santé publique, il fait aussi état, dans ses déclarations d’intérêts, de collaborations récentes avec les laboratoires avec Sanofi-Pasteur et Sanofi-Aventis. Coïncidence, son épouse, en tant que directrice médicale pour le syndicat des industrie pharmaceutiques, siège à la Commission d’autorisation de mise sur le marché (celle qui donne son feu vert aux vaccins).

Conflits d’intérêts. Les hommes politiques sont-ils plus neutres ? Le site Pharmacritique rappelle que Roselyne Bachelot a passé au moins 12 ans au service de l’industrie pharmaceutique. Ce parcours professionnel n’est malheureusement pas signalé sur son CV (site du gouvernement). « Docteur en pharmacie, Roselyne Bachelot a occupé, avant d’entrer dans la politique au début des années 1980, le poste de déléguée à l’information médicale au sein du laboratoire ICI Pharma (devenu Astra Zeneca depuis) et chargée des relations publiques chez Soguipharm ». Depuis, ICI Pharma est devenu la multinationale Astra Zeneca » qui a des intérêts dans la commercialisation du Gardasil, vaccin contre le cancer du col de l’Utérus, un vaccin activement promu par le ministère de la Santé. Certes ces liens sont anciens, mais ils entachent malgré tout l’impartialité de la ministre.

La famille du président de la république gravite aussi dans la sphère pharmaceutique, comme le rappelle le Figaro ( 16 avril 2008). François Sarkozy, frère de Nicolas « poursuit dans l’ombre un parcours sans faute dans la santé. (…) il vient de prendre la présidence d’AEC Partners, important cabinet œuvrant dans le domaine de la santé, dont il est associé depuis 2001. Et il se prépare aussi à lancer, le 22 avril, (…) LongeviTV, premier WebTV magazine dédié à l’anti-âge. LongeviTV a déjà fédéré des sponsors comme Nestlé, Sanofi Aventis ou HSBC Assurances. François Sarkozy est aussi depuis 2005 vice-président du conseil de la société de biotech cotée Bio Alliance Pharma ». Ce n’est donc pas de ce côté là que le président de la République trouvera un point de vue contradictoire aux intérêts des laboratoires.

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